Révolution fraternelle, Le cri des pauvres

Prix : 4€

L’audacieux pari de ce petit livre est de reconstruire – nous reconstruire – à partir des plus démunis.

couverture essais Revolution fraternelle veronique fayetCes « personnes pauvres » –, aujourd’hui 14 % de la société française –, nous dit Véronique Fayet, osent souvent ce que nous n’osons pas, entravés par les préjugés à leur encontre. La révolution fraternelle est à ce prix. Face à une économie outrancièrement financière, face aux extrêmes à l’affût. Ce livre doit beaucoup aux 70 000 bénévoles du Secours catholique, aux 1 362 770 personnes qu’ils ont accompagnées, écoutées.

Il était l’heure d’un tel manifeste : un livre de chair, un livre de vie, où les savoirs des plus démunis se croisent avec les savoirs d’experts et de ces bénévoles. Mais ce cri qu’entend l’auteure n’est pas seulement celui des pauvres, c’est aussi celui de la planète et de la démocratie menacées.

L’auteur : Véronique Fayet

Véronique Fayet, après une maîtrise d’économie du développement, part vivre dix-huit mois en Afghanistan où son mari est coopérant. À son retour, elle s’engage avec ATD-Quart Monde à Bordeaux et, en 1989, appelée par Jacques Chaban-Delmas, elle y devient conseillère municipale.

De 1995 à 2014, elle est l’adjointe d’Alain Juppé, maire de Bordeaux, en charge des questions de solidarité et de lutte contre l’exclusion, et vice-présidente de la Communauté urbaine, en charge de l’habitat, puis conseillère régionale de 2004 à 2010. Elle est présidente du Secours Catholique-Caritas France depuis 2014.


Bloc-notes / Jean-Claude Guillebaud / La Vie

Le cri des pauvres

J’emprunte ce titre à une dame remarquable, Véronique Fayet, qui préside le « Secours catholique-Caritas France » depuis 2014. Elle vient de publier un petit livre (une trentaine de pages) que j’ai lu et relu ces derniers jours. (Révolution fraternelle, le cri des pauvres, Indigène éditions). Ces pages seront ensevelies, assurément, par le tsunami de la « rentrée littéraire ». Ce sera injuste, et surtout, à bien réfléchir, absurde.

Ces pages disent l’essentiel du moment et donnent voix à la souffrance sociale, celle que les politiciens s’emploient à ne pas entendre. Il est vrai que le langage dominant favorise ce déni et cette surdité volontaire. Il parle de « classes moyennes inférieures », de précarité et nous renvoie commodément à des statistiques sans chair ni visage.  Devant cette obsession statistique, on peut penser à cette remarque glaciale de Bernanos, dans sa « Lettre aux Anglais » (1949) « Tous les chiffres qu’ils avaient avalés au cours de leur funèbre vie, afin de se prémunir contre d’improbables entraînements du cœur, encombraient leur appareil circulatoire, et ils étaient gonflés de statistiques comme des outres. »

L’ironie est sévère mais justifiée. Comme si les chiffres, à eux seuls, pouvaient cerner le réel de la pauvreté. Et le reste alors ? Et l’humiliation ? Et l’indifférence ? Et cette haine recuite dont témoigne la « pauvrophobie » qui gagne du terrain en France ? Pour ne pas parler de ces jérémiades dédaigneuses des nantis (ou l’agacement des économistes médiatiques) prompts à vitupérer « l’assistanat » ou le « compassionnel ».

Comment ne pas réagir en chrétien devant ce mépris claironné ? Dans son encyclique de 2013, « La Joie de l’Évangile », le pape François le disait tout net : « Le manque d’attention spirituelle est la plus grande discrimination dont souffrent les pauvres ». Dès après son élection, ce pape que l’extrême droite qualifie de « gauchiste », avait rappelé une évidence évangélique, à savoir que « la liberté de vivre à l’abri de la peur et du besoin est bien un droit humain qui fonde la dignité humaine. » Je cite Véronique Fayet.

Cette dernière avait rejoint ATD-Quart Monde dès 1989. Elle est donc bien placée pour identifier le péril qui menace la démocratie elle-même. « Ce qui se joue, ajoute-t-elle, c’est bien le pacte commun qui nous unit. Le matelas démocratique s’amincit quand le “halo” de la pauvreté grandit et que les vraies, les grandes questions, demeurent sans réponse. »

Ceux que la misère n’empêche plus de dormir se moqueront de cet idéalisme qu’ils identifieront à je ne sais quelle naïveté. Ils tomberont mal ! L’auteure de ce livre est titulaire d’une maîtrise d’économie du développement. Elle fut l’adjointe d’Alain Juppé, alors maire de Bordeaux, puis vice-présidente de la Communauté Urbaine. Ce n’est pas une simple rêveuse sentimentale. Son livre porte trace de nombreuses et fortes lectures au sujet de la pauvreté, de la solitude, des personnes fragiles, de l’exclusion.

Mais ce travail ne l’empêche pas de garder la flamme d’une combattante. « Le cri que j’entends résonner, écrit-elle encore, est un triple cri : le cri des pauvres, le cri de la planète, le cri de la démocratie ». Ce livre est audacieux, au meilleur sens du terme : l’audace de l’amour.


Veronique Fayet : « Les gens en souffrance veulent être utiles ».

Consultez l'article du Figaro !

Veronique Fayet : « J’en appelle à la révolution fraternelle ».

Consultez l'article du Pélerin !